Évaluation de la Stratégie de collecte de données uniformisée à l’échelle nationale sur les crimes motivés par la haine

Cette section présente les conclusions de l’évaluation, classées en trois principaux domaines d’évaluation (pertinence, rendement et solutions de rechange) et selon les principaux thèmes relevés.

3.1. Pertinence

3.1.1. Harmonisation avec les priorités ministérielles et fédérales

Conclusion : Au moment de sa mise en œuvre, la stratégie de collecte de données s’harmonisait de façon explicite avec les priorités du gouvernement fédéral. Lorsqu’elle relevait de Patrimoine canadien, la stratégie de collecte de données était liée aux résultats stratégiques de ce ministère. Il n’y a pas eu pour l’instant de tels liens créés à CIC, qui en est maintenant responsable, même si l’architecture des activités du programme (AAP) est en cours de mise à jour pour refléter le mandat du Programme du multiculturalisme. Le rôle du gouvernement fédéral en matière de gestion et de prestation de la stratégie de données est approprié, car la coordination nationale est un élément clé de l’initiative.

Harmonisation avec les priorités fédérales

La documentation évaluée dans le cadre de l’évaluation fournit des preuves solides selon les quelles la stratégie de collecte de données s’harmonisait bien avec les priorités du gouvernement fédéral qui visent à corriger les lacunes dans la collecte d’information sur les crimes haineux. En juin 2003, le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration a recommandé au gouvernement du Canada (GC) de surveiller les crimes haineux et de présenter ses conclusions au ParlementNote de bas de page 6. Dans le discours du Trône subséquent, soit en octobre 2004, il a été déclaré que le GC était dévoué à « défendre l’inclusion avec vigueur » et prendrait des mesures pour « renforcer la capacité du Canada à lutter contre le racisme, la propagande haineuse et les crimes motivés par la haine »Note de bas de page 7. De plus, le PACCR a reconnu le besoin de procéder à une collecte de données uniformisée à l’échelle nationale sur les crimes haineux et a précisément déclaré que le Programme du multiculturalisme, en collaboration avec le CCSJ, était en train d’élaborer une « stratégie nationale normalisée de collecte de données sur les crimes motivés par la haine, de même qu’un programme de formation et d’aide à l’intention des corps policiers pour appuyer leurs efforts de collecte de données et de production de rapports »Note de bas de page 8.

On peut conclure que la stratégie de collecte de données cadre avec la déclaration plus récente du présent gouvernement de s’engager à améliorer l’inclusion et l’harmonie sociales. Selon le discours du Trône de 2010, « renforcer un Canada uni dans un monde en évolution » faisait partie du « programme d’action général » du GC et il a été déclaré qu’« être Canadien signifie montrer au monde entier qu’il est possible pour les personnes de toutes les nationalités de vivre en harmonie »Note de bas de page 9.

Les représentants de la Direction générale de la citoyenneté et du multiculturalisme interrogés au cours de l’évaluation ont aussi laissé entendre que la stratégie de collecte de données est une priorité pour le GC et ont indiqué qu’elle soutenait les priorités du GC en matière d’inclusion, de loi et d’ordre.

Harmonisation avec les résultats stratégiques et les priorités ministérielles

La stratégie de collecte de données s’harmonisait avec un des résultats stratégiques de Patrimoine canadien, comme il est indiqué dans son Rapport sur les plans et les priorités 2008-2009 : « Le Canada est une société ouverte à tous fondée sur la compréhension interculturelle et la participation des citoyens »Note de bas de page 10. La Direction générale du multiculturalisme de ce ministère, qui était responsable de la stratégie de collecte de données, a été transférée à CIC en octobre 2008. Les personnes interrogées à la Direction générale de la citoyenneté et du multiculturalisme de CIC ont laissé entendre que la stratégie s’harmonisait avec les résultats stratégiques ministériels de CIC en matière d’intégration et de cohésion sociale. Cependant, la Direction générale de la citoyenneté et du multiculturalisme n’est pas encore liée aux résultats stratégiques de CIC dans l’AAP ministériel, bien que cela soit en train de se faire. Il est important de souligner que CIC est maintenant responsable de la Loi sur le multiculturalisme, qui nécessite que toutes les institutions fédérales élaborent des politiques, des programmes et des pratiques qui sont sensibles et ouverts à la réalité multiculturelle canadienne et qui contiennent, en particulier les questions d’intégration pour les Canadiens, nouveaux et établis.

Au cours de récents discours, le ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme, a aussi dénoncé directement l’antisémitisme et d’autres formes de haine. Récemment, lors de discours prononcés à la Coalition parlementaire canadienne de lutte contre l’antisémitisme (8 février 2010) et lors d’une conférence des ministres de l’Éducation tenue au Centre de dialogue et de prière dans le cadre des événements entourant le 65e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau à Auschwitz, en Pologne (27 janvier 2010), le ministre a fait référence à des statistiques sur les crimes haineux antisémites compilées grâce à la stratégie de collecte de donnéesNote de bas de page 11.

Harmonisation avec les rôles et les responsabilités fédérales

La gestion et la prestation de la stratégie de collecte de données sont des rôles appropriés pour le gouvernement fédéral. Comme il est mentionné par les personnes interrogées au sein de CIC, le gouvernement fédéral est le mieux placé pour gérer la stratégie de collecte de données, parce que l’initiative requiert une coordination et une collaboration avec de nombreux types d’organismes et ordres de gouvernement (y compris des services de police municipaux, provinciaux, fédéraux et des Premières nations) dans les dix provinces et les trois territoires. Le gouvernement fédéral est bien placé pour compiler les données et travailler avec les services de police de ces multiples administrations.

Il est aussi bien placé pour répondre aux engagements du Canada. Le Canada est signataire de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (CIEDR), et, en vertu de l’article 9 de la Convention, doit envoyer des rapports périodiques concernant la mise en œuvre de la Convention, ce qui implique la production de rapports sur des sujets tels que les crimes haineuxNote de bas de page 12.

Le Canada est aussi un État participant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dont le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) travaille avec ses membres pour combattre l’intolérance et la discrimination, notamment par la collecte de données sur les crimes haineux. Le BIDDH publie des rapports sur les statistiques des crimes haineux compilés par ses États membresNote de bas de page 13.

3.1.2. Nécessité de la stratégie de collecte de données

Conclusion : L’évaluation a permis de déterminer que la stratégie de collecte de données a toujours sa raison d’être. La surveillance des crimes haineux est importante dans le contexte actuel de diversité raciale, religieuse et culturelle croissante. Les services de police et les autres intervenants appuient massivement la stratégie et soutiennent les engagements internationaux du Canada visant à produire des rapports.

Contexte et prévalence des crimes haineux au Canada

Selon les recherches sur les crimes haineux, les individus qui sont le plus à risque d’être des victimes d’activités motivées par la haine et de préjugés comprennent : les individus ou les groupes appartenant à des minorités raciales et ethniques, les minorités religieuses, ainsi que les gais et lesbiennesNote de bas de page 14.

La recherche montre aussi que la population canadienne se diversifie de plus en plus et que sa composition raciale, culturelle, religieuse, linguistique et démographique change continuellement. Le Canada abrite plus de 200 groupes ethniques et 16 % de sa population fait partie d’une minorité visible. L’information du recensement (à laquelle on fait référence dans le rapport sur le crime haineux 2009 du CCSJ) montre que la population des minorités visibles a augmenté de 27 % de 2001 à 2006, soit cinq fois plus rapidement que l’ensemble de la population. Le pays connaît aussi une croissance de la visibilité des gais et lesbiennes, comme le démontre le nombre de couples du même sexe, qui a augmenté de 33 % au cours de la même période. De plus, la composition religieuse du pays change aussi et on constate que les confessions musulmanes, hindoues, sikhes et bouddhistes ont connu les plus fortes hausses de 1991 à 2001Note de bas de page 15.

Des éléments de preuve laissent croire que dans le contexte de cette diversité croissante, il existe des signes d’intolérance. Par exemple, l’enquête sur la diversité ethnique (2002) révèle que près de la moitié des répondants noirs et du tiers des répondants originaires d’Asie du Sud et de Chine ont déclaré avoir été victimes de discrimination ou de traitement injuste au cours des cinq années précédentesNote de bas de page 16. Un sondage effectué par la firme Ekos, en 2003, révèle que 46 % des Autochtones vivant hors réserve ont indiqué qu’ils avaient été victimes de racisme ou de discrimination en raison de leur origine ethnique au cours des deux années précédentesNote de bas de page 17.

Il y a eu 1 036 crimes motivés par la haine déclarés par la police canadienne en 2008, l’année la plus récente pour laquelle le CCSJ avait publié des données au moment de l’évaluation. Ce nombre représentait une augmentation comparativement aux 765 crimes en 2007 et aux 892 en 2006, la première année pour laquelle des statistiques quasi nationales sur les crimes haineux étaient accessibles. Soulignons que cette augmentation peut être en partie attribuable à la sensibilisation accrue du public à ce type de crimes, ainsi qu’à l’amélioration des pratiques de déclaration de la police. La grande majorité des crimes haineux déclarés en 2008 étaient fondés sur la race (55 %), la religion (26 %) ou l’orientation sexuelle (16 %). Un peu moins de la moitié des crimes motivés par la haine étaient des méfaits, comme des graffitis, et environ 5 % étaient des infractions violentes. Bien que moins de 1 % des crimes soient motivés par la haine, la recherche laisse croire que les crimes haineux peuvent avoir un effet retentissant sur les plus grandes collectivités et sur l’ensemble du CanadaNote de bas de page 18. Perry (2009) déclare que, outre les répercussions sur les victimes elles-mêmes, les crimes haineux peuvent aussi être perçus comme un avertissement à tous les membres de la collectivité de la victime et ils peuvent entraîner une peur collective au sein du groupe culturel ou de la collectivité de la victimeNote de bas de page 19.

L’information recueillie au cours des entrevues et de l’enquête concorde avec les constatations de cette recherche. Près de la moitié des personnes interrogées et 59 % des répondants à l’enquête ont indiqué que les crimes haineux étaient prévalents au Canada. Les répondants à l’enquête ont aussi indiqué qu’en général la prévalence des crimes haineux était restée la même (41 %) ou avait augmenté (23 %) au cours des dernières années.

Points de vue des intervenants concernant la nécessité de disposer de données uniformisées sur les crimes haineux

Les services de police et les autres intervenants consultés au cours de l’évaluation sont massivement d’accord avec la nécessité d’une collecte de données sur les crimes haineux uniformisée à l’échelle nationale. Dans l’ensemble, 96 % d’entre eux étaient d’accord pour dire que les crimes motivés par la haine constituaient un problème important. De plus, 97 % d’entre eux étaient d’accord avec la nécessité de disposer de données uniformisées à l’échelle nationale sur les crimes motivés par la haine au Canada, principalement parce que les données sont utiles pour éclairer les travaux menés par les services de police (91 %) et pour comparer les statistiques des crimes motivés par la haine de leur région avec celles d’autres régions et de l’ensemble du Canada (92 %).

Les personnes interrogées au cours de l’évaluation étaient toutes d’avis que la stratégie de collecte de donnée est nécessaire, principalement parce qu’il y a un besoin général de données sur la prévalence des crimes haineux, qu’il y a un besoin d’uniformité dans les données sur les crimes haineux au Canada et que des données uniformisées à l’échelle nationale sont nécessaires pour éclairer les décisions politiques.

Engagements internationaux

Les instances internationales ont également souligné la nécessité de recueillir et de déclarer les statistiques sur les crimes motivés par la haine. Lors de son évaluation pour la période de juin 2001 au printemps 2005, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale du CIEDR a souligné l’absence de statistiques générales sur les crimes haineux au Canada, ventilées par groupes ethniques et raciaux, à cette époqueNote de bas de page 20. L’OSCE a appelé les pays à adopter des procédures de collecte de données rigoureuses et uniformiséesNote de bas de page 21. Cela est conforme à la déclaration qui a suivi la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance (Durban, Afrique du Sud, 2001), qui invitait les États membres à recueillir et à déclarer, à l’échelle nationale et locale, des données statistiques pour évaluer régulièrement la situation des individus et des groupes d’individus qui sont victimes de racisme et d’intoléranceNote de bas de page 22.

Le Canada sera également signataire de la Déclaration de Londres sur la lutte contre l’antisémitisme, qui précise que les gouvernements devraient mettre à la disposition du public des statistiques sur les crimes haineux et que les services de police devraient faire en sorte que les incidents antisémites deviennent des éléments de routine de la déclaration de crimesNote de bas de page 23. La Déclaration de Londres a émergé de la Conférence de Londres sur la lutte contre l’antisémitisme (2009), organisé par la Coalition interparlementaire pour la lutte contre l’antisémitisme et le Ministère des Affaires étrangères du Royaume­-Uni et du Commonwealth.

La collecte de données uniformisée à l’échelle nationale sur les crimes haineux est également compatible avec les pratiques de l’extérieur du Canada. D’autres pays ont commencé à recueillir et à déclarer des données uniformisées à l’échelle nationale sur les crimes haineux, bien que ce ne soit pas toujours le cas même en Europe et en Amérique du Nord. Aux États­-Unis, les données colligées sur les crimes motivés par la haine par les différents organismes d’application de la loi sont compilées et présentées dans le Uniform Crime Report du Federal Bureau of Investigation, mais seulement 20 % des services de police pertinents se conformaient à cette initiative en 2008Note de bas de page 24. Le Canada était, en fait, un chef de file de cette pratique. La Conférence de Vienne sur le crime haineux (novembre 2006) a exhorté les pays à suivre le modèle canadien pour la collecte de données sur les crimes haineux.

3.2. Rendement

3.2.1. Enquête sur l’utilisation du Programme de déclaration uniforme de la criminalité 2.2

Conclusion : Le nombre de services de police qui déclarent des données sur les crimes haineux en utilisant le Programme DUC 2.2 a augmenté chaque année. Comme plus de services migrent de l’enquête complémentaire vers le Programme DUC 2.2, les données sur les crimes haineux représentent maintenant un grand pourcentage de la population canadienne et sont de plus en plus exhaustives.

Enquête sur l’utilisation du Programme de déclaration uniforme de la criminalité, version 2.2

Bien que les nombres varient légèrement d’année en année, l’information fournie par SC montre qu’en janvier 2010, il y avait 1 198 détachements de police qui faisaient partie de 201 services de police différents au Canada. Depuis le début de la stratégie de collecte de données, le nombre de ces services qui se sont convertis au Programme DUC 2.2 a augmenté de façon importante (tableau 3-1).

Tableau 3-1 :  Nombre de services de police qui utilisent le programme DUC 2.2, par type de service (2006-2010)
Type de service de police Janvier 2006 Janvier 2007 Janvier 2008 Janvier 2009 Janvier 2010
Services municipaux 28 32 70 76 136
Détachements de la Gendarmerie royale du Canada 23 52 151 179 703
Détachements de la Police provinciale de l’Ontario 0 0 0 3 198
Détachements de la Sûreté du Québec 0 0 94 96 95
Détachements de la Force constabulaire royale de Terre-Neuve 0 3 3 3 3
Total 51 87 318 357 1 135

Source : Statistique Canada, bibliothèque des répondants (Respondent Library).

Au cours de la première année de financement de la stratégie par le PACCR (2005-2006), un total de 51 services et détachements de police déclaraient des données sur les crimes haineux en utilisant le Programme DUC 2.2. Ce nombre comprend 28 services de police municipaux et 23 détachements de la GRC en Colombie-Britannique. Depuis ce temps, le nombre de services de police municipaux qui utilisent le Programme DUC 2.2 a connu une augmentation constante et il y a maintenant 136 services (sur un total de 197) qui utilisent le Programme DUC 2.2 depuis janvier 2010 (tableau 3-1)Note de bas de page 25. De façon similaire, le nombre de détachements de la GRC qui utilisent le Programme DUC 2.2 a augmenté de façon constante avec le temps. Cependant, la majorité des détachements ne se sont pas convertis au Programme DUC 2.2 avant 2010 (les 703 détachements de la GRC utilisent tous le Programme DUC 2.2 depuis janvier 2010).

Les trois forces de police provinciales du Canada se sont aussi converties au Programme DUC 2.2. Les trois détachements de la Force constabulaire royale de Terre-Neuve ont commencé à utiliser le Programme DUC 2.2 en 2006. La Sûreté du Québec (SQ) a commencé à utiliser le Programme en 2007 et il y a maintenant 95 de ses 96 détachements qui s’en servent. Bien que quelques détachements de la Police provinciale de l’Ontario (OOP) se soient convertis au Programme DUC 2.2 en 2008 (c.-à-d. trois), pratiquement tous les détachements (198 sur 199) avaient procédé à la conversion en janvier 2010.

Ainsi, depuis janvier 2010, un nombre total de 1 135 détachements différents (soit, 95 % de tous les détachements) utilisaient le programme DUC 2.2 (Graphique 3-1). Il n’y a en ce moment aucun service de police des Premières nations qui utilisent le Programme DUC 2.2. Cependant, de l’information de SC indique qu’un d’entre eux commencera à s’en servir cette année. Il est important de souligner que SC ne s’attend pas nécessairement à la participation de tous les services de police canadiens; SC reconnaît qu’ils n’ont pas tous les capacités (p. ex. techniques, financières) de se convertir au Programme DUC 2.2. Cette position est conforme à l’information donnée par les personnes interrogées, qui ont aussi souligné ces problèmes. En conséquence, la pleine participation au Programme DUC 2.2 ne sera pas possible au moyen des ressources actuellement à la disposition des services de police.

Graphique 3-1 : Pourcentage des services de police qui utilisent le Programme DUC 2.2, par type de service (2006-2010)
Graphique 3-1 : Pourcentage des services de police qui utilisent le Programme DUC 2.2, par type de service (2006-2010)

Version texte : Pourcentage des services de police qui utilisent le Programme DUC 2.2, par type de service (2006-2010)

Couverture de la population

Comme il est mentionné précédemment, au cours de la première année de la stratégie de collecte de données (2005), un nombre total de 51 services de police déclaraient des données sur les crimes haineux à l’aide du Programme DUC 2.2 (tableau 3-2). Pour cette année-là, SC a calculé que les données représentaient 16 % de la population canadienne. Alors que de plus nombreux services et détachement ont commencé à se servir du Programme DUC 2.2, le pourcentage de la population canadienne représentée par ces données a également augmenté, pour atteindre 52 %, en 2008. À la suite de l’introduction de l’enquête complémentaire, en 2006, le pourcentage de la population canadienne représenté par les données sur les crimes haineux a augmenté à 87 % et ensuite à 88 % en 2008.

Tableau 3-2 : Pourcentage de la population canadienne représenté par les données sur les crimes haineux déclarées par la police
Année Nombre de services/détachements qui utilisent DUC 2.2 Population couverte par DUC 2.2 (%) Population couverte par l’enquête complémentaire (%) Couverture combinée (%)Note de bas de page 26
2005 51 16 -- 16
2006 87 21 66 87
2007 318 48 39 87
2008 357 52 35 88
2009Note de bas de page 27 1 135 -- -- --

Avec le temps, le pourcentage de la population canadienne représentée par le Programme DUC 2.2 a augmenté, tandis que le pourcentage de la population canadienne représentée par l’enquête supplémentaire a diminué. Cela porte à croire que davantage de services sont passés de l’enquête complémentaire au Programme DUC 2.2. Cela a eu des répercussions sur l’exhaustivité des données en général, comme l’information recueillie par le Programme DUC 2.2 est plus détaillée que celle recueillie par l’intermédiaire de l’enquête complémentaire, tel qu’il est décrit dans la Section 1.2 (Profil de la Stratégie de collecte de données uniformisée à l’échelle nationale sur les crimes motivés par la haine). Compte tenu du nombre de nouveaux services qui utilisent le Programme DUC 2.2 depuis mars 2010, le pourcentage de la population couverte par les déclarations du Programme devrait encore augmenter.

3.2.2. Formation et outils pour les services de police

Conclusion : Une formation et des outils ont été mis à la disposition des services de police et ceux qui ont reçu la formation l’ont trouvé utile. La formation est considérée comme importante pour assurer l’uniformité dans l’application de la définition et pour déterminer par la suite si un crime est haineux. Le nombre de services qui utilisent le Programme DUC 2.2 est supérieur au nombre de services qui reçoivent la formation et, compte tenu de l’augmentation récente du nombre de services qui utilisent le Programme DUC 2.2, ces écarts dans la formation risquent de s’accroître, ce qui pourrait nuire à l’uniformité des données déclarées par les services de police.

Formation au Programme DUC 2.2 et outils

Le CCSJ a fourni un nombre d’options de formation pour les services de police. Il a mis au point un cours de formation pour le Programme DUC 2.2., de même qu’un manuel de formation pour les participants. Ce cours de formation et le manuel connexe sont à la disposition de tous les services et détachements intéressés. Le manuel est disponible sous différents formats (p. ex. papier, version électronique) et est accessible par l’intermédiaire du CCSJ ou de son site extranet. Entre 2005-2006 et 2008-2009, un total de 156 services et détachements de police, comptant un nombre total de 681 participants, ont reçu une formation au Programme DUC 2.2 du CCSJ (tableau 3-3). Plus récemment, le CCSJ a commencé à offrir des ateliers de formation régionaux afin de rejoindre un plus grand nombre de participants. Le CCSJ vise également à former ceux qui peuvent ensuite offrir une formation au sein de leur propre service de police.

En plus de la formation offerte, le CCSJ offre aux services de police de l’aide téléphonique au besoin et s’affaire à mettre au point des panel panel-defaults de formation par enseignement virtuel.

Tableau 3-3 : Nombre de services ou détachements de police et nombre de participants qui ont reçu une formation au Programme DUC 2.2 (de 2005-2006 à 2008-2009)
Année Nombre de services/détachements formés Nombre de participants formés
2005-2006 19 135
2006-2007 23 156
2007-2008 45 170
2008-2009 69 220
Total 156 681
Nécessité de la formation pour appuyer la déclaration de données sur les crimes haineux

La grande majorité des membres du CISP qui ont été interrogés (8 sur 9 membres interrogés) étaient d’accord pour dire qu’il était nécessaire de fournir aux services de police des séances et des documents de formation pour la collecte et la déclaration de données sur les crimes haineux. Les membres du CISP ont mentionné que la formation était importante pour assurer l’uniformité et fiabilité des données (3 sur 5), pour améliorer le niveau de sensibilisation et de connaissance des agents de police relativement à la déclaration de crimes haineux (2 sur 5) et parce que les services de police ne disposaient pas des ressources nécessaires pour donner la formation eux­-mêmes (1 sur 5). Les deux personnes interrogées du CCSJ ont elles aussi convenu que la formation était importante pour assurer l’uniformité et la fiabilité des données. Plus spécifiquement, l’importance de la formation a été liée à la nécessité de faire en sorte que les services de police aient une définition et une compréhension commune des crimes haineux.

Ces conclusions correspondaient aux conclusions de l’enquête menée auprès des services de police. Tous les répondants pertinents à l’enquête (25 sur 25) étaient d’accord pour dire qu’il était important pour les services de police de recevoir une formation du CCSJ avant de recueillir et de déclarer des données sur les crimes haineux dans leur région. Parmi les répondants à l’enquête qui connaissaient la formation offerte par le CCSJ, la majorité (16 sur 19 répondants, soit 84 %) a déclaré que les séances de formation avaient permis d’améliorer la qualité des données déclarées par les services de police sur les crimes motivés par la haine. Cette information laisse penser que la formation est un élément important de la mise en œuvre de la stratégie de collecte de données.

Satisfaction à propos la formation reçue

L’information recueillie dans le cadre de l’évaluation indique un degré élevé de satisfaction à propos la formation au Programme DUC 2.2 offerte par le CCSJ. Les formulaires de rétroaction sur la formation, qui ont été remis aux participants des formations par le CCSJ en 2005-2006, indiquaient que les participants étaient extrêmement satisfaits de la formation reçue et qu’ils n’ont pas mentionné de points qui pourraient être améliorés.

Les personnes interrogées aux fins de l’évaluation et les répondants à l’enquête ont aussi très bien coté la qualité de la formation et des outils. Trois des quatre personnes interrogées du CISP qui ont pu commenter la formation ont laissé entendre qu’elle était très bien (l’autre personne a souligné que la formation ne ciblait pas les bonnes personnes, mais n’a pas commenté la qualité de la formation en tant que telle). Un tiers (33 %) des répondants à l’enquête ont déclaré que leur service de police avait reçu la formation ou les documents de formation du CCSJ. Ces répondants ont donné une note positive à la formation et aux outils, laissant entendre que les séances étaient utiles (94 %) et que le matériel de formation était utile (95 %). Les répondants ont aussi déclaré que les séances avaient permis d’améliorer la qualité des données déclarées par leur service de police (84 %) et que la formation leur avait donné la connaissance et l’information nécessaires pour recueillir et déclarer des données sur les crimes motivés par la haine. Cela permet de penser qu’il y a des avantages importants associés à la formation offerte aux services de police.

Écarts relativement à la portée de la formation

Comme indiqué dans la section ci-haut, le CCSJ a offert des formations sur place à de nombreux services et détachements de police (c.-à-d. 156 formations sur une période de quatre ans). Si l’on considère que toutes ces formations ont été offertes par une seule personne du CCSJ, il s’agit d’un nombre important de formations.

Cependant, l’enquête a révélé que la formation donnée ne correspondait pas au nombre de services ou détachements de police qui utilisent le Programme DUC 2.2. En fait, avec le temps, l’écart entre le nombre de services et détachements qui utilisent le Programme et le nombre de services ou détachements formés par le CCSJ (tableau 3-4) est demeuré important. En 2005-2006, environ 37 % des services qui utilisaient le Programme ont reçu la formation, tandis qu’en 2008-2009, c’était le cas pour environ 44 % des services qui utilisaient le Programme.

Tableau 3-4 : Nombre total de services et de détachements formés par rapport au nombre de services et de détachements qui utilisent le Programme DUC 2.2 (de 2005-2006 à 2008-2009)
Année Nombre de services/détachements qui utilisent le Programme DUC 2.2 Nombre total de services/détachements formés Pourcentage de services/détachements formés
2005-2006 51 19 37,3 %
2006-2007 87 42 48,3 %
2007-2008 318 87 27,4 %
2008-2009 357 156 43,7 %

On peut souligner qu’il est impossible de déterminer dans quelle mesure les services de police offrent une formation à l’interne après avoir reçu eux-mêmes la formation au Programme DUC 2.2 (p. ex. un participant de la GRC qui donne des formations à d’autres détachements). De plus, le CCSJ offre une autre méthode de formation (c.-à-d. documents accessibles en ligne) et on ignore dans quelle mesure les services de police accèdent à ces autres méthodes pour leur usage personnel. Ainsi, il se peut qu’un plus grand nombre de services ait été formé que ce qu’indiquent ces chiffres. Néanmoins, il reste probablement un grand écart entre le nombre de formations données et les besoins et il est possible que cet écart continue de croître. Comme il a été discuté dans la section 3.2.1 (Enquête sur l’utilisation du Programme de déclaration uniforme de la criminalité 2.2), 778 services et détachements de police ont commencé à utiliser le Programme DUC 2.2 pour la première fois en 2009-2010. Cette augmentation présentera des défis en matière de formation et il a été déterminé que la formation était un élément important pour assurer l’uniformité dans l’application de la définition des crimes haineux.

Une autre question soulevée par l’évaluation concerne le champ d’application de la formation. Bien que peu des personnes interrogées et des répondants à l’enquête aient souligné des choses à améliorer dans la formation, certaines informations laissent penser que la formation ne cible pas nécessairement toujours les bonnes personnes. Une personne interrogée et trois répondants à l’enquête (sur les six personnes qui ont suggéré des améliorations) ont indiqué que la formation n’avait pas été donnée aux bonnes personnes (p. ex. elle était donnée aux experts en matière de crime haineux, mais pas à la majorité du personnel qui répond aux appels). Comme les policiers sont directement impliqués dans la détection et la déclaration des crimes haineux, il serait important d’offrir une formation à ce groupe afin que tous les agents aient une compréhension commune de la définition des crimes haineux et puissent donc déclarer ces derniers d’une manière uniforme.

3.2.3. Qualité des données

Conclusion : Le CCSJ utilise un processus systématique pour valider et confirmer les données sur les crimes haineux envoyés par les services de police. Plus les services de police qui ont commencé à déclarer les crimes haineux étaient nombreux (ce qui a permis d’accroître la couverture géographique des données) et plus ils étaient nombreux à migrer vers le Programme DUC 2.2, plus complet, plus les données envoyées sont devenues exhaustives. La sous-déclaration des crimes haineux par les policiers a eu un impact sur l’utilité des données et la formation est perçue comme un moyen pour aider à résoudre ce problème.

Dans l’ensemble, la qualité des données sur les crimes haineux a augmenté depuis la mise en œuvre de la stratégie de collecte de données. Comme discuté à la section 3.2.1 (Utilisation du Programme de déclaration uniforme de la criminalité 2.2), la couverture géographique des données du Programme DUC 2.2 a augmenté de façon continue depuis le début de la stratégie. De plus, la quantité d’informations accessibles sur les crimes haineux a augmenté avec le temps, à mesure qu’un plus grand nombre de services de police ont migré de l’enquête supplémentaire vers le Programme DUC 2.2.

Le fait que le CCSJ utilise un processus systématique pour vérifier les données améliore encore plus leur qualité. Les données déclarées par les services de police sont soumises à des contrôles de vérification qui impliquent, par exemple, de signaler les réponses inconnues pour faire un suivi et de veiller à ce que certains crimes (tels que l’incitation publique à la haine et l’encouragement au génocide) soient toujours considérés comme des crimes haineux. Le CCSJ collabore avec les services de police pour corriger toute incohérence ou erreur dans les données. Toutes les données soumises et validées sont renvoyées à chaque service de police pour approbation et consentement à la divulgation publique.

Bien que la portée, l’ampleur ainsi que la précision et l’uniformité des données sur les crimes haineux sont bonnes, la sous-déclaration des crimes haineux demeure un problème qui affecte la qualité globale des données. La sous-déclaration des crimes haineux n’est pas unique au Canada et a été citée dans la littérature académique au niveau international comme un problème en matière de crimes haineuxNote de bas de page 28. Bien qu’on ignore à quel taux les crimes haineux sont actuellement sous-déclarés, les conclusions du GSS de 2004 ont montré que seulement 40 % des crimes haineux étaient signalés à la police par les victimes, selon les Canadiens interrogés qui se sont déclarés eux-mêmes comme victimes de crimes haineuxNote de bas de page 29. Les victimes ne signalent pas toujours les crimes haineux à la police pour un nombre de raisons qui peuvent comprendre la peur ou la réticence à s’identifier en tant que membre d’un groupe nommé. De plus, certains agents de police peuvent ne pas reconnaître un crime haineux ou choisir de ne pas le signaler comme telNote de bas de page 30.

Près de la moitié (8 sur 18) des membres du CISP et des autres intervenants des milieux académiques et des ONG ont soulevé le problème de la sous-déclaration au cours des entrevues. Lorsqu’il leur a été demandé si la qualité des données pouvait être améliorée, la plupart des personnes interrogées (12 sur 19) ont offert des suggestions d’amélioration qui étaient souvent liées à la nécessité de régler le problème de la sous-déclaration par les agents. Les membres interrogés du CISP ont parlé du manque d’uniformité dans la déclaration des crimes haineux par les services de police et ont indiqué que, malgré l’amélioration de la déclaration avec le temps, il y avait encore des lacunes. Comme l’a souligné l’un des membres d’un service de police : [traduction] « Il y a encore une perception chez certains [agents de police] que, un peu comme la violence conjugale était autrefois considérée comme un problème à régler dans sa famille, les crimes haineux sont des problèmes à régler avec la collectivité et non avec la police ».

En conséquence à la sous-déclaration des victimes et de la police, certains intervenants sont sceptiques quant au nombre de crimes haineux déclarés par les services de police en ce moment. Cela a eu un impact sur la mesure dans laquelle les données sont considérées comme utiles ou informatives. Quelques-uns des intervenants interrogés ont indiqué que, en conséquence de la sous-déclaration, ils n’avaient pas suffisamment confiance en ces données pour tirer des conclusions sur les taux de crimes haineux. Comme un membre d’un service de police qui avait consulté les données a noté, à la suite de la sous-déclaration : [traduction] « nous ne savons pas si ce qui est déclaré est représentatif de la réalité ». Un universitaire qui fait des recherches sur les crimes haineux a également souligné que : « les données ne sont tout simplement pas encore là pour nous montrer avec justesse [la prévalence des crimes de haine] ».

La formation donnée sur la déclaration des crimes haineux par le CCSJ est vue comme une manière de corriger la sous-déclaration au sein de la police. La formation donne de l’information aux agents de police pour les aider à déclarer les crimes haineux. Comme discuté à la section 3.2.2 (Formation et outils pour les services de police), les personnes interrogées et les répondants à l’enquête croient que la formation du CCSJ a été importante pour accroître l’uniformité dans les déclarations faites par la police et peut être une méthode efficace pour aider à réduire les lacunes lors de la déclaration.

3.2.4. Connaissance des données sur les crimes haineux

Conclusion : Le CCSJ a rendu l’information recueillie dans le cadre de la stratégie de collecte de données accessible sur le site Web de Statistique Canada et a publicisé les données ainsi que les conclusions en participant à des conférences et à d’autres événements. La connaissance de cette information ne semble pas être partout égale.

L’information de la stratégie de collecte de données est d’abord rendue accessible par l’intermédiaire du site Web de SC, où le public peut accéder sans frais au principal produit d’information, qui est un rapport annuel sur les crimes haineux au Canada. De plus, des tableaux statistiques sont accessibles sur le site extranet et des tableaux personnalisés peuvent être demandés à SC moyennant des frais. Le CCSJ a aussi donné les rapports annuels sur les crimes haineux directement à ses contacts du CISP et à d’autres intervenants qui s’intéressent à ce domaine par une liste de distribution qu’il a développée. Finalement, le CCSJ a participé à 16 conférences nationales et internationales entre 2006-2007 et 2008-2009 au sujet de ses travaux sur la collecte de données sur les crimes haineux et la déclaration de ceux-ci. Au cours de ces conférences, le CCSJ a fait la promotion des rapports sur les crimes haineux. CIC a aussi fait de la sensibilisation auprès des intervenants lors des congrès de Metropolis en 2009 et 2010. Malgré ces activités promotionnelles, les niveaux de connaissance de l’information des groupes cibles semblent varier.

Bien que seulement trois rapports annuels aient été produits à ce jour, chacune de ces publications a été consultée davantage que les précédentes. Selon les données sur l’achalandage du site Web de SC, le rapport de 2006 a été téléchargé 280 fois, alors que le rapport de 2007 a été téléchargé 1 400 fois, ce qui suggère que les données suscitent plus d’intérêt qu’auparavantNote de bas de page 31. De plus, les intervenants interrogés dans le cadre de l’évaluation ont montré qu’ils connaissaient assez bien les produits d’information. Sur les 19 intervenants, 15 d’entre eux ont indiqué connaître les produits. On peut souligner que les évaluateurs ont eu des difficultés à entrer en contact avec des universitaires qui étaient au courant de la stratégie et donc en mesure de donner de l’information sur les données recueillies.

Les services de police interrogés n’étaient pas très familiers avec les données. Seulement 37 % des répondants ont indiqué qu’ils étaient familiers avec l’information recueillie par SC au sujet des crimes motivés par la haine. Même parmi ceux qu’ils ont indiqué que leur service déclarait des données au CCSJ, seulement 43 % ont dit connaître les produits d’information.

Chez tous ceux qui connaissaient l’information, les sources qu’ils ont le plus fréquemment nommées étaient les rapports analytiques (79 %). Un moins grand nombre d’entre eux connaissait les tableaux de données et les demandes de données personnalisées (59 %) ou les présentations de conférence (32 %).

On peut souligner que CIC considère les universitaires et les intervenants du milieu de la justice pénale comme les principaux destinataires des données. Ainsi, il n’est peut-être pas raisonnable de s’attendre à ce que les services de police interrogés soient très familiers avec les données.

3.2.5. Utilisation des données sur le crime haineux

Conclusion : Les données disponibles laissent croire qu’en général, les services de police et les intervenants qui les ont consultés les trouvent utiles. Les services de police utilisent les données comme outil analytique pour étayer leur travail, tandis que CIC les a utilisées pour étayer ses messages, ses produits de communication et les travaux faits sur les politiques. Les intervenants ont déclaré que les données leur ont permis de mieux comprendre les crimes haineux, même si elles ne sont probablement pas encore utilisées à leur plein potentiel. L’utilisation des données devrait croître à mesure que le nombre d’années de données accessibles augmentera.

À moyen terme, les résultats attendus de la stratégie sont notamment une meilleure compréhension par les intervenants de la nature et de l’étendue des crimes motivés par la haine au Canada et, à long terme, l’utilisation par les intervenants de leur connaissance des crimes motivés par la haine pour améliorer les programmes, les politiques et les services et pour surveiller les répercussions des changements sur ce type de crime.

Des entrevues et un sondage menés auprès des services de police ont permis d’examiner dans quelle mesure ces résultats étaient atteints. Il y a deux limites principales à prendre à considération. Tout d’abord, comme il a été discuté à la section 2.3 (Limites et considérations) l’évaluation s’est faite sans qu’on ait accès à une liste des destinataires des produits d’information sur les crimes haineux offerts par le CCSJ. Les entrevues et l’enquête auprès des services de police se sont révélées être des sources d’information précieuses sur l’utilisation des données, mais cette information n’est pas complète. Ainsi, la véritable étendue de l’utilisation des données sur les crimes haineux ne pouvait pas être exactement mesurée. Deuxièmement, seulement trois rapports annuels sur les crimes haineux au Canada ont été publiés à ce jour. Il est raisonnable de supposer que cette information sera plus utilisée quand un plus grand nombre d’années d’information seront accessibles et que les tendances au fil du temps en matière de crimes haineux pourront être relevées et étudiées.

Meilleure compréhension des crimes haineux.

Parmi les services de police répondants à l’enquête qui étaient familiers avec les produits d’information publiés par SC sur les crimes motivés par la haine, la plupart (64 %) étaient d’accord pour dire que l’information leur avait donné une meilleure compréhension de ce type de crime. Un peu plus de la moitié des personnes interrogées qui avaient consulté les données sur les crimes haineux (6 sur 10) étaient convaincues que les données avaient amélioré leur compréhension de ce type de crime de façon positive (c.-à-d. qu’ils ont noté l’amélioration trois ou quatre, sur une échelle de quatre). Quatre des personnes interrogées ont indiqué un changement négatif (c.-à-d. donné une note d’un ou de deux sur une échelle de quatre). Ces répondants ont expliqué qu’ils n’avaient pas confiance dans les données, qu’ils attendaient qu’il y ait plus d’années de données afin de déterminer les tendances ou que les produits d’information n’avaient pas été mis à leur disposition assez rapidement pour être utiles.

Utilisation des données pour améliorer les programmes, les politiques et les services et pour surveiller les répercussions des changements sur ce type de crime.

L’évaluation a permis de détecter des exemples précis de changements aux politiques, aux programmes ou aux services qui ont été faits grâce aux données sur les crimes haineux. Une des personnes interrogées a souligné que la stratégie avait convaincu les services de police à adopter une définition du crime haineux uniformisée à l’échelle nationale. Un des répondants à l’enquête a indiqué qu’une unité de prévention du crime motivé par la haine avait été créée par suite de la participation de son service de police à l’initiative.

Selon la théorie du programme, la stratégie de collecte de données devrait avoir comme résultats, à long terme, que les intervenants « utilisent leur connaissance des crimes motivés par la haine pour améliorer les programmes, les politiques et les services ». Cependant, la nature du transfert de la connaissance et de la mobilisation est intrinsèquement complexe et il peut avoir été difficile pour les répondants à l’enquête et pour les participants aux entrevues de lier l’information recueillie grâce à la stratégie de collecte de données à des changements précis à des politiques, des programmes et des services. De façon générale, si les répondants indiquent que l’information leur a donné une meilleure connaissance dans un domaine particulier ou s’ils ont utilisé ces données pour éclairer l’élaboration de politiques et de programmes, on considère cela comme une preuve suffisante de l’utilité de la stratégie. De plus, il est trop tôt pour s’attendre à ce que les données, qui ne couvrent que trois années, aient une incidence directe sur les changements aux politiques, aux programmes ou aux services.

L’information obtenue lors des entrevues et de l’enquête montre que l’information est utilisée à différents degrés et que différents intervenants utilisent les données à des fins diverses. On a demandé aux répondants à l’enquête menée auprès des services de police qui ont déclaré être familiers avec les produits d’information si, à leur connaissance, les produits d’information étaient utilisés dans leur service de police. Environ la moitié de ces répondants (47 %) ont déclaré que c’était le cas. En réponse à la même question, 17 % de tous les répondants ont indiqué que l’information recueillie par SC avait été mise à profit.

Lorsqu’on leur a demandé de quelle façon l’information avait été utilisée, plus de la moitié des répondants à l’enquête (9 sur 16) ont indiqué qu’elle avait servi à des fins d’analyse. Les exemples donnés indiquent notamment que l’information avait été utilisée pour faire des déclarations au chef de police, qu’elle avait permis d’informer les services de police sur les tendances de la criminalité dans la région et que des comparaisons avaient été faites sur les taux de crimes haineux entre différentes régions. Deux des répondants ont indiqué que l’information avait servi à faire des changements (non spécifiés) aux programmes ou aux pratiques, alors que deux autres ont indiqué que l’information avait contribué à procéder à une allocation des ressources éclairée. D’autres ont mentionné que l’information avait aidé les services de police dans l’exercice de leurs fonctions, avait été utilisée pour des présentations et du matériel promotionnel et avait servi à éclairer la formation sur les enquêtes sur les crimes haineux.

La plupart des membres interrogés du CISP et des autres intervenants (11 sur 13) ont indiqué qu’ils avaient consulté les données sur les crimes haineux. Bon nombre de ces intervenants ont indiqué qu’ils l’avaient fait afin de s’informer, de faire de la recherche, d’aider à la déclaration (9 sur 13) et de comparer les taux de crimes haineux dans leur région avec ceux des autres régions (4 sur 13). Un membre du CISP a indiqué que les données obtenues ont eu comme résultat, pour son service de police, d’augmenter la sensibilisation dans la communauté gaie et lesbienne.

Les répondants de CIC ont mentionné que l’information avait été utilisée pour éclairer le ministre de CIC sur les crimes haineux et dans des communications ministérielles, en particulier en lien à l’antisémitisme (y compris dans la période qui a précédé la signature de la Déclaration de Londres sur la lutte contre l’antisémitisme). Cela a été confirmé par les références spécifiques à la stratégie de collecte de données sur les crimes haineux antisémites qui ont été faites par le ministre dans des discours récents. Les répondants de CIC ont également indiqué que les données servaient à éclairer le travail des policiers. En particulier, les renseignements ont été utilisés pour mener des discussions avec des partenaires provinciaux et territoriaux ainsi qu’avec d’autres participants lors de tables rondes sur le racisme.

3.3. Solutions de rechange

3.3.1. Solutions de rechange pour la conception et la prestation

Conclusion : Bien que l’Enquête sociale générale de SC compile des données et serve à produire des rapports sur les victimes de crimes haineux, les données de la stratégie de collecte représentent la seule source disponible au pays de statistiques sur les crimes haineux déclarés par les services de police. L’évaluation a révélé que Statistique Canada est un agent de prestation très apprécié pour la stratégie de collecte des données et que la plupart des intervenants étaient en faveur de son rôle dans l’initiative. De plus, le CCSJ a démontré qu’il peut répondre à ses exigences de déclaration et de prestation.

Autres sources de données sur les crimes haineux

La stratégie de collecte de données est la seule source annuelle de données pancanadiennes sur les crimes motivés par la haine déclarés par les services de police. Il s’agit de l’une des deux sources de statistiques sur les crimes haineux au Canada. SC mène également une enquête régulière sur la victimisation au moyen de son ESG. L’ESG est menée tous les cinq ans et se fonde sur les témoignages personnels de crimes haineux, plutôt que sur les crimes haineux qui sont portés à l’attention des agents de policeNote de bas de page 32. Les données de l’ESG sont complémentaires aux données sur les crimes haineux déclarés par la police, plutôt que de les dupliquer, car elles permettent d’examiner les données sur les crimes haineux de deux points de vue différents, en utilisant des approches distinctes.

Il existe quelques autres sources d’informations connexes, mais aucune n’est aussi exhaustive que la stratégie. Le B’nai Brith, par exemple, recueille ses propres données et fait ses propres rapports sur les crimes haineux antisémites, à la lumière des incidents qui ont été déclarés directement à l’organisme. De plus, comme mentionné par les personnes interrogées, les autres sources disponibles ne sont pas sujettes au même degré de vérification que celui fourni par SC.

Autres organismes de prestation possible

L’évaluation n’a pas permis de déterminer d’autres organismes crédibles qui pourraient s’occuper de la prestation de la stratégie de collecte de données. Comme il a été dit auparavant, bien que d’autres organismes recueillent des données sur les crimes haineux en lien à des communautés spécifiques (p. ex. B’nai Brith pour la communauté juive) et que certains services de police font depuis longtemps la collecte et la déclaration de données sur les crimes haineux dans leur région, il n’y avait pas d’autres organismes qui compilaient, validaient et faisaient des rapports exhaustifs à l’échelle nationale sur les crimes haineux signalés par les services de police. De plus, le CCSJ est le seul à offrir une formation qui soutient une approche uniformisée à l’échelle nationale de la déclaration des crimes haineux par les services de police.

Le CCSJ est aussi bien placé pour être responsable de la stratégie de collecte de données, car il recueille déjà des données sur la criminalité au pays dans le cadre de son rôle établi au sein du gouvernement du Canada. Les données du Programme DUC 2.2 sur les crimes haineux forment une partie d’un plus grand système de gestion de données, qui comprend aussi des données de base sur la criminalité et de nouvelles variables liées à différents types de crimes, tels que le crime organisé, la cybercriminalité, etc. En tant que centre de collecte de statistiques de toutes sortes sur la criminalité, le CCSJ complète la formation, l’analyse, le soutien et la création de rapports entrepris dans le cadre de la stratégie.

Les personnes interrogées appuyaient fortement le rôle de SC dans la Stratégie. La majorité de ces personnes (19 sur 21) étaient d’accord pour que SC soit responsable de la mise en œuvre du programme. Deux des personnes interrogées ont mentionné comme autre possibilité que la prestation pourrait se faire par les organismes collectifs. Cependant, un bon nombre de personnes interrogées ont souligné que SC était l’organisme le plus objectif, le plus expérimenté et le plus crédible pour s’occuper de la mise en œuvre de la Stratégie. Quelques-unes des personnes interrogées ont aussi souligné que SC possédait la capacité de mettre en œuvre la stratégie en plus de déjà entretenir des liens positifs avec les services de police.

Selon des entrevues menées auprès de membres de la Direction générale de la citoyenneté et du multiculturalisme de CIC, SC a aussi montré qu’il peut tenir ses engagements en matière de déclaration et de prestation. L’évaluation a permis de confirmer que le CCSJ a soumis un rapport annuel complet de ses activités et de ses résultats dans le cadre de ses engagements de déclaration. Pour chaque année financière, de 2005-2006 à 2008-2009, le CCSJ a présenté à CIC des rapports de fin d’année dans le cadre des accords entre les deux organismes. Il a également présenté au secrétariat du PACCR le rapport annuel qui est demandé pour toutes les initiatives que l’organisme finance. De plus, le CCSJ a terminé ses activités prévues à l’aide des ressources fournies par CIC pour la stratégie de collecte de données.

Coûts actuels de la prestation

Tel qu’il est mentionné à la section 1.2.2 (Approche de la prestation), le CCSJ a reçu 1,66 million de dollars pour la stratégie de collecte de données sur une période de cinq ans. Cela équivaut à un coût annuel moyen de 332 100 $.

Il faut souligner que la LA en place entre CIC et SC n’oblige pas le CCSJ à produire un rapport sur le coût actuel de la prestation de la Stratégie. Ainsi, cette information n’était pas accessible pour l’évaluation. On ignore donc dans quelle mesure le montant de financement fourni était approprié en fonction des coûts actuels nécessaires pour assurer la prestation de la Stratégie. Cependant, à la lumière de l’information recueillie au cours de l’évaluation, les coûts pour CIC paraissent raisonnables en fonction de la quantité d’activités entreprises et des résultats obtenus par le CCSJ. De plus, compte tenu du fait que le Programme DUC 2.2 est un système de collecte de données existant, il n’y a pas de coûts associés à la collecte de données sur les crimes haineux en tant que telle, ce qui rend la stratégie de collecte de données plus rentable. En outre, l’information donnée par le CCSJ indique que le financement accordé pour la stratégie permet l’administration de l’enquête complémentaire, l’analyse des données recueillies et la prestation de formations aux services de police. L’enquête complémentaire et la formation, en particulier, ont contribué à l’exhaustivité et à l’uniformité des données sur le crime haineux et n’auraient autrement peut-être pas été entreprises.

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